Le Vendée Globe sans les paquets de mer ? C'est jouable... sur le net

Le Vendée Globe, c'est Loïck Peyron choquant la voile dans les 40e rugissants ou Jean Le Cam mal rasé s'harnachant pour monter dans le mât, mais c'est aussi Chantal, retraitée de 61 ans, et 185.000 autres concurrents acharnés à boucler, jour et nuit, leur tour du monde... sur le net.

"Virtual Regatta", ou comment barrer son monocoque à coups de clics de souris: ce jeu gratuit, développé par le groupe Many players, a commencé au coup de sifflet du départ du Vendée Globe début novembre et il a entraîné dans son sillage près de 185.000 accros à la voile ou à la tactique sportive.

Tout y est: gestion du sommeil, changement de voile, passage des portes et conditions météo réelles, renouvelées deux fois par jour, sur le même parcours que les pros. Le but est aussi le même, franchir le plus vite possible la ligne d'arrivée, avec à la clé 10.000 euros pour le vainqueur.

Les bateaux de tête dans le jeu étaient samedi quasiment au même point que les vrais navigateurs, à un peu plus de 17.000 milles de l'arrivée prévue fin février. Parfois même, les navigateurs sur canapé dépassent les pros.

"Moi je viens de passer la porte de l'Atlantique, je suis au Cap Horn !", s'emballe Chantal Lafoi, résidente de Talais (Gironde), un peu dépitée cependant d'avoir récemment perdu 10.000 places dans le classement à cause d'une mauvaise stratégie soufflée par son mari, pourtant ancien voileux.

Depuis un mois, cette retraitée de 61 ans ne se couche "pas avant une heure du matin" pour surveiller l'avancée de son bateau et son ordinateur reste connecté toute la journée. "J'ai toujours suivi le Vendée Globe, une course difficile avec des vents compliqués. Je me repère sur les navigateurs pour savoir comment je vais me placer", explique-t-elle avec entrain.

Le jeu s'adapte aux conditions réelles: lorsque les organisateurs de la course ont déplacé la porte numéro 2, dite Porte Kerguelen, vers le Nord pour éviter les icebergs, les développeurs du jeu ont fait de même.

Seuls les courants marins mondiaux, comme ceux liés à la marée, n'ont pas été intégrés dans le Vendée Globe Virtuel. Et, sur la toile, on ne peut ni casser sa voile ni percuter un autre concurrent.

Les trois enfants de Chantal et son petit-fils de 18 ans se sont aussi lancés dans la course mais elle peste contre ses fils qui ont acheté pour 20 euros l'option de pilotage automatique pour la nuit. "Moi je suis une puriste, je navigue à la dure!" dit-elle.

Quand on éteint son ordinateur, le bateau continue d'avancer avec les derniers paramètres qu'on lui a fixés jusqu'à la prochaine connexion.

Sa fille Isabelle, 44 ans, s'était sentie "frustrée de rester à terre" en regardant le départ du Vendée Globe à la télévision. "Et puis j'ai découvert ce jeu où il faut travailler sur du long terme avec une tactique, comme pour la course à la voile autour du monde en solitaire sans escale et sans assistance".

"Je me lève la nuit, je suis mon bateau avant de partir au travail et me connecte plusieurs fois par jour au bureau", avoue cette cadre informatique, si mordue qu'elle vient de se renseigner pour passer le permis bateau.

Isabelle lit les commentaires des navigateurs sur le site officiel de la course pour savoir comment "partir sur l'ouest pour récupérer les 40e et ne pas perdre de temps". Invitée chez des amis pour Noël, elle a réservé un hôtel avec une connexion wifi.

"Ce jeu rend les rêves moins inaccessibles", dit-elle.

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